La vernalisation contrôlée par un processus épigénétique

Un ARN non codant est requis afin que certaines plantes deviennent aptes à fleurir après une exposition au froid.

Un ARN non codant est requis afin que certaines plantes deviennent aptes à fleurir après une exposition au froid.
La vernalisation, processus par lequel certaines plantes acquièrent la capacité à fleurir rapidement au printemps après une exposition durable au froid hivernal, vient de livrer un de ses secrets à une équipe de l’institut de biologie cellulaire et moléculaire de l’université d’Austin au Texas. Dans une publication parue dans le numéro du 07 janvier de la revue Science, Jae Bok Heo et Sibum Sung révèlent l’existence d’un contrôle épigénétique de ce phénomène (1).

Chez Arabidospis thaliana, le gène FLC (Flowering Locus C) code pour un facteur de transcription bloquant l’expression des gènes nécessaires à la floraison, en absence de vernalisation. Lors d’une exposition au froid, l’expression de FLC diminue progressivement. Le processus devient irréversible lorsque la structure de la chromatine associée à FLC se trouve modifiée, empêchant alors son expression. Ceci a pour effet de lever l’inhibition sur l’expression des gènes de la floraison.

L’étude menée par Heo et Sibum a montré qu’un ARN non codant, c’est à dire issu de la transcription de l’ADN mais non traduit en protéine, appelé COLDAIR (Cold Assisted Intronic Non Coding RNA) est nécessaire à la répression de FLC.
Plus précisément, c’est l’association de COLDAIR avec un complexe protéique du nom de PRC2 (Polycomb Repressive Complexe 2) qui a pour effet d’éteindre FLC. Les deux éléments interagissent avec la chromatine au niveau du gène FLC contribuant ainsi à stabiliser celle-ci sous une forme empêchant l’expression de FLC.

Les ARN non codants ont déjà montré leur importance dans de nombreux processus en interagissant avec des domaines spécifiques de la chromatine et induisant ainsi, de façon épigénétique, la répression de la transcription de certains gènes. Ainsi, par exemple, leur rôle est établi dans des modification de l’architecture de la racine en réponse aux variations de facteurs environnementaux, en particulier chez la luzerne tronquée Medicago trunculata (2). Chez l’homme, leur rôle semble essentiel dans le phénomène d’empreinte parentale.

Plus que jamais, la compréhension des mécanismes épigénétiques apparaît comme une voie de recherche particulièrement prometteuse, dont l’exploration ne fait que commencer. Ces derniers pourraient jouer un rôle majeur, en particulier chez les végétaux, dans leur réponses aux variations des conditions environnementales (stress abiotiques, interaction avec les micro-organismes chez les légumineuses)(3).

1. Heo J. B., Sung S. (2011) Vernalization-Mediated Epigenetic Silencing by a Long Intronic Noncoding RNA, Science 331, 76.

2. Boualem A., Laporte P., Jovanovic M., Laffont C., Plet J., Combier J.P., Niebel A., Crespi M. and Frugier F. (2008) – MicroRNA166 controls root and nodule development in Medicago truncatula. Plant J 54, 876-887.

3. Ben Amor B., Wirth S., Merchan F., Laporte P., D’Aubenton-Carafa Y., Hirsch J., Maizel A., Mallory A., Lucas A., Deragon J.M., Vaucheret H., Thermes C. and Crespi M. (2008) Novel long non-protein coding RNAs involved in Arabidopsis differentiation and stress responses. Genome Research, doi:10.1101/gr.080275.108

Jérôme Ozouf

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Photo d’illustration : par Sonja, on youthemedia.eu, licence CC-by

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