Cambodge : techniques de pliage des pétales de fleur de lotus
De l’Inde à l’Asie Orientale, le lotus (Nelumbo nucifera) est une espèce végétale de prime importance. Ses utilisations pratiques sont multiples : alimentation, textile, emballage, thé… Culturellement, cette plante joue également un rôle majeur, puisqu’elle est très souvent présente dans les représentations religieuses. Les divinités hindouistes et le Bouddha sont souvent assis sur des sièges constitués de fleurs de lotus stylisées.
Traditionnellement, les fleurs de lotus sont offertes au Bouddha pendant les jours d’observance religieuse, les huitième et quinzième jours des lunes ascendante et descendante, c’est-à-dire quatre fois par mois lunaire. Mais au Cambodge comme en Thaïlande, la fleur de lotus a aussi, en-dehors des temples, une valeur purement décorative. Les fleurs sont souvent présentes dans de nombreux lieux publics : elles ornent des bassins placés dans les halls d’hôtel, elles servent à décorer les tables des restaurants… Elles peuvent être proposées dans leur forme naturelle, fermées, ou bien sont transformées par des techniques, plus ou moins élaborées, de pliage de leurs pétales. Ce sont à ces techniques de pliage des fleurs de lotus que nous nous intéressons dans le présent article.
Pour les pliages des pétales, deux variétés de lotus sont utilisées : la variété dite « lotus aux cent pétales » (ឈូកមួយរយស្រទាប់ [chhouk mouy-roy srâtoap]), qui a une fleur ronde, ramassée, et qui, comme son nom l’indique, possède de nombreux pétales ; la seconde variété, dite « lotus ‘bay’ » (ឈូកបាយ [chhouk bay]), a une forme plus élancée, plus pointue, et ses pétales sont moins nombreux. Les effets produits par les pliages des pétales de ces deux variétés sont assez différents.
Les fleurs de lotus utilisées au Cambodge sont de trois couleurs : blanches, roses et rouges. Dans un même pliage, il peut arriver que l’on ajoute, par exemple, des pétales rouges au pliage d’une fleur blanche.
Il est essentiel d’utiliser des fleurs très fraîches, faute de quoi les pétales deviennent rapidement durs et friables, ils se détachent facilement du réceptacle, et leur pliage devient difficile. La fraîcheur des fleurs permet aussi de garantir une plus grande longévité des fleurs pliées. Pour allonger cette longévité, on trempe parfois les fleurs pliées dans de l’eau à laquelle on a ajouté un peu de vinaigre blanc, ou l’on ajoute aussi un peu de jus de citron vert à l’eau du vase dans lequel sont placées les fleurs. Certains conseillent aussi d’ajouter un cachet de paracétamol à l’eau du vase, ce qui permet de prévenir l’apparition trop rapide de bactéries.
Les techniques de pliage possibles sont nombreuses. Mademoiselle Long Lina, ancienne étudiante des Beaux-Arts, présente dans un ouvrage intitulé « Techniques de pliage des fleurs de lotus » (របៀបបាត់ផ្កាឈូក [râ-biep bât phka chhouk]), Éditions Nokor Vat, Phnom Penh, 2011 ; ISBN-13 : 978-99963-28-22-0) plus de vingt techniques différentes. Ces techniques sont souvent désignées par des noms évocateurs : pliage en fleur de bananier, en griffes de Garuda, en fleur romduol (la fleur romduol est le symbole floral du Cambodge), en queue de paon…
La technique de pliage la plus basique consiste tout simplement à plier les pétales en deux, vers l’intérieur de la fleur.
Une autre technique simple consiste à enrouler les pétales sur eux-mêmes, dans une seule et même direction autour de la fleur.
D’autres techniques sont beaucoup plus complexes et nécessitent de plier les pétales dans plusieurs directions, de façon à obtenir des effets plus élaborés, comme dans le cas des « griffes de Garuda » ci-dessous.
Les techniques de pliage des pétales de fleur de lotus étaient traditionnellement enseignées dans les pagodes, et faisaient partie des savoirs fondamentaux que devait posséder toute jeune fille cambodgienne de bonne famille. Aujourd’hui, les techniques de base sont souvent enseignées aux enfants de l’école primaire. Les fleuristes cambodgiens maîtrisent quant à eux parfaitement de nombreuses techniques de pliage des fleurs de lotus.
Il faut noter aussi que cet art floral est également largement présent en Thaïlande.
Dans la vidéo ci-dessous, une jeune femme cambodgienne démontre une technique de pliage d’une fleur de lotus aux cent pétales.
Dans cette vidéo-là, elle démontre une technique de pliage d’une fleur de lotus « bay ».
Remerciements : Il nous faut remercier vivement Mademoiselle Veasna Tith, qui a eu l’extrême patience de nous démontrer et de tenter de nous enseigner, sans grand succès, quelques techniques simples de pliage des pétales de fleurs de lotus. C’est elle qui a réalisé les pliages présentés sur les photos du présent article.
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2 commentaires
savez vous si cette technique est ancienne au Cambodge? au Laos, à Louang Prabang, on considère que c’est une innovation des Thaï qui n’est pas traditionnelle.