Réflexions sur l’avenir des plantes adventices, dont les messicoles

Dans le cadre de notre appel à rédaction d’articles sur le thème des herbes folles, Gérard Souche nous propose une réflexion sur l'avenir des plantes messicoles.
Lycopsis arvensis L. par Claude Viquesnel, CC BY-SA Tela Botanica

Réflexions sur l'avenir des plantes adventices, dont les messicoles

Les plantes messicoles ont une stratégie de dispersion et d’implantation directement liée à une perturbation majeure ayant un effet mécanique sur le sol. C’est pour cela que, initialement, avant l’intervention de l’homme agriculteur, ces espèces ne devaient prospérer qu’en des endroits bien spécifiques tels que les zones alluviales, les plaines inondées, les endroits labourés lors du passage par les troupeaux de grands animaux, etc. Ensuite, et ce pendant plusieurs millénaires, les activités agricoles de l’homme ont largement favorisé ces espèces.

Ce n’est que dernièrement, depuis quelques décennies, avec l’intensification des pratiques agricoles, les labours profonds, l’utilisation croissante d’engrais azotés, d’herbicides, l’abandon ou le changement de culture des parcelles à faible rendement en céréales, etc. que ces espèces ont fortement régressé. En outre, conjointement, ceci a été favorisé par la forte régression des populations d’insectes pollinisateurs.

Que faire pour inverser cette tendance ? On peut se demander à présent si les nouvelles pratiques culturales plus respectueuses de l’environnement seront suffisantes ne serait-ce que pour pérenniser ces espèces.

Limiter voire supprimer les herbicides semble incontournable, mais encore faut-il proposer des solutions alternatives viables et rentables pour les agriculteurs. Actuellement, en termes de travail du sol, on déconseille fortement les labours. Ne plus labourer permet de conserver une structure des sols plus conforme à leur bon fonctionnement et ce de façon pérenne. C’est également un bon moyen pour favoriser le retour de la macro-faune des sols et le fonctionnement du cycle de la matière organique. En outre, cela permet de laisser en place une couverture végétale permanente qui favorise la biodiversité et protège les sols de l’érosion.

Pour remplacer le labour, en grandes cultures, le plus souvent c’est le semis direct qui est préconisé. La question que l’on peut se poser c’est de savoir si les Messicoles seront ou non favorisées par cette nouvelle pratique. Est-ce qu’elles pourront faire preuve d’une résilience suffisante pour s’imposer par rapport à la culture ainsi qu’aux autres adventices, nettement plus compétitives.

Dans les pratiques culturales usitées en agriculture biologique, afin de limiter les adventices, on préconise le passage de la herse étrille. Ceci n’est pas non plus favorable aux messicoles que leur stratégie d’enracinement au stade plantule rend particulièrement vulnérables. De plus, la plupart d’entre elles sont des annuelles et ne se reproduisent pas par clonage.

En ce qui concerne l’agriculture biologique, en termes de rentabilité la présence de graines d’adventices pose problème lors du tri des graines de céréales à leur arrivée aux silos. De ce fait, certaines récoltes peuvent être déclassées. Pour contrer cela, Il faut favoriser et aider à la mise en place de réseaux de retraitement des graines qui permettent ce tri de manière efficace et point trop onéreuse afin que l’agriculture biologique ne soit pas pénalisée et que les adventices, dont les messicoles, soient tolérées.

L’avenir de ces espèces pourrait bien être lié à des mesures d’incitations au niveau régional, voire européen, et notamment de la Politique Agricole Commune (PAC) au travers des mesures agro-environnementales (MAE), notamment la mise en place par les agriculteurs (voire d’autre acteurs : bénévoles, associations, etc.) de jachères, de cultures Faunistiques et Floristiques. Ceci suppose aussi la mise en place d’un réseau capable de fournir des semences d’adventices dont des messicoles à un coût acceptable. Ceci pourrait également se faire en liaison avec le secteur apicole.

Proposez votre article !

Cet article a été rédigé par Gérard Souche suite à l’appel à articles sur le thème “Les herbes folles du milieu urbain au monde rural”.

Si le thème vous intéresse, nous vous invitons à consulter les conditions de participation en cliquant sur le lien ci-dessous et à nous transmettre vos articles à l’adresse suivante : appel_article@tela-botanica.org ! Au plaisir de vous lire !

2 commentaires

  1. Bonjour. C’est encore plus compliqué : les bios font du désherbage mécanique en hiver et au printemps, ce qui ne permet pas aux messicoles de se développer. Le labour tant décrié (à raison) permet aux graines de messicoles de ressortir assez tôt durant leur courte vie pour germer. Mais un réseau d’acteurs fédérés par les conservatoires botaniques nationaux et associant la profession agricole y travaille : le deuxième plan national d’actions en faveur des messicoles va sortir avant la fin de l’année, des tractations ont lieu pour la mise en oeuvre de MAEC… Les messicoles sont menacées mais nous sommes assez nombreux à réfléchir et à agir pour stopper l’érosion, et peut-être même pour « inverser la courbe » comme disait un Président de la République. Attention dans vos propos à ne pas mélanger messicoles et adventices, bien distinctes dans leur écologie et à traiter différemment, même si quelques espèces sont sur la frontière.

  2. Oui, il faut bien dstinguer messicoles et adventices. les vraies messicoles miment le cycle des céréales. Elles étaient récoltées avec les céréales, et ressemées avec elles. Elles ont en fait disparu avec le tri des semences. Je n’imagine pas qu’un agriculteur fasse exprès de ressemer des messicoles !

    La pression de sélection sur elles étant la même que pour les céréales, certaines d’entre elles sont même devenues des plantes cultivées, comme le seigle ou la caméline. Et un chercheur allemand me disait que la nielle était pratiquement une plante cultivée, sauf qu’on n’en avait trouvé aucun usage…

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