Herbes folles et teinture végétale
Les herbes à la campagne ne sont ni folles ni mauvaises ! Elles sont vertueuses et généreuses. C’est le plus souvent l’homme qui, par manie du désherbage pour faire propre, par l’usage des pesticides, de l’exploitation intensive, est mauvais à leur égard.
La nature est généreuse si on la laisse tranquille. Les champs, les bords de chemins que l’homme a délaissés débordent d’herbes folles. Elles sont un véritable spectacle vivant.
Si on prend le temps de les regarder, de les observer, on remarque qu’elles ne sont jamais là par hasard. Elles nous renseignent sur la nature du sol, la saison. Elles rendent service à la faune avoisinante, en offrant à la fois le gîte et le couvert. Et, comme elles ont un naturel généreux, elles rendent, à nous les hommes, de multiples services, grâce à leurs propriétés aromatiques, médicinales mais aussi tinctoriales.
Leurs propriétés tinctoriales sont étonnantes, et peut être les plus méconnues.
Observer les herbes folles, les cueillir, pour faire de la couleur sur quelques fils de laine. Et broder avec ces fils … des fleurs. Une activité apaisante, que j’aime découvrir et partager. Elle est aussi une manière aussi de rendre hommage à cette flore, trésor de biodiversité.
Partir en promenade, cueillir le long des chemins, quelques brassées de plantes et fleurs : tels sont les premiers pas vers la couleur végétale. De retour à la maison, il convient de les couper menue patiemment à l’aide d’un ciseau, d’une cisaille ou d’un sécateur.
Puis les plonger dans l’eau pour une longue décoction avec l’excitation de découvrir la couleur qui va apparaître. Notre flore locale est riche en flavonoïdes, famille de colorants offrant des jaunes. Des jaunes plus ou moins jolis, plus ou moins intenses.
En teinture végétale, les floraisons jaunes offrent, en général, du jaune. Le plus connu est celui de la gaude ou réséda. Plante, riche en lutéoline, elle donne un jaune acidulé qui peut virer au jaune d’or en milieu basique. Elle se trouve plutôt sur les sols en friche, pauvres et calcaires.
Sur des sols plutôt acides, la verge d’or, le millepertuis, le genêt, la tanaisie, le pissenlit, le séneçon donneront d’autres nuances de jaune.
Mais les herbes sont parfois un peu folles. Il ne faut pas se fier aux apparences. La couleur de la fleur peut être trompeuse : l’achillée millefeuille aux belles inflorescences blanches offre un joli jaune verdâtre et, la bruyère aux délicates fleurs rosés peut nous surprendre avec des jaunes orangés. Les fougères et orties sont aussi intéressantes à expérimenter. Les nuances varient selon la saison et le climat.
Cependant, les plantes, les herbes ne se laissent pas apprivoiser aussi facilement. Pour que le colorant se fixe aux fibres, il faut préalablement les mordancer. C’est une étape indispensable le plus souvent. Et pour ce faire, en teinture végétale, on recourt le plus souvent aux sels d’aluminium, à l’alun. Mais j’ai fait le choix de ne pas l’utiliser de plusieurs raisons et je préfère un mordançage sans alun, un mordançage végétal. Ainsi, les bains de teinture sont entièrement compostables et je peux rendre à la nature ce que je lui ai pris.
C’est un moyen de leur rendre hommage et de prolonger la méditation débutée lors de la cueillette. S’inspirer de leurs formes, de leurs lignes, de leurs couleurs, pour tracer au fil de laine, teints aux plantes, leur contour. La broderie végétale devient méditative comme la ballade aux bords des chemins de campagne.
Cet article a été rédigé par Céline Philippe suite à l’appel à articles sur le thème “Les herbes folles du milieu urbain au monde rural”. Vous retrouverez l’intégralité de son travail sur comment teindre en jaune avec des plantes et pouvez la contacter via son site Internet Teinture sauvage.
Si le principe des appels à articles vous intéresse, n’hésitez pas à consulter régulièrement le site de Tela Botanica ainsi que ses réseaux sociaux pour prendre prochainement connaissance du prochain thème. Au plaisir de vous lire !
18 commentaires
Pour info, j’ai mis en ligne tout le livre de Dambourney, Louis-Alexandre, 1786 Recueil de procédés et d’expériences sur les teintures solides que nos végétaux indigènes communiquent aux laines & aux lainages. allez à https://uses.plantnet-project.org/fr/Dambourney,_Louis-Alexandre
Dambourney a expérimenté toutes les plantes possibles de France…
Cordialement.
Génial ! Merci pour le partage
Merci beaucoup pour ce partage. Il me reste à trouver le temps de le lire…
Je l’ai parcouru. C’est un travail très intéressant. Heureusement on a abandonné les métaux lourds comme apprêt.
Bonjour
Vous avez mis el ligne la livre de Dambourney mais le lien n’a pas fonctionné.
Merci de me donner la solution.
Cordialement
Lucile Dangin
Bonjour ! Intéressant le mordançage sans alun. Je suis preneuse de plus d’infos sur les quantités et la méthode, notamment avec le rumex qui se trouve en abondance sur mon terrain ! il me semblait que le rumex colorait en brun, ce qui me rend d’autant plus curieuse de l’utiliser pour faire tenir le jaune…
La rumex est une alternative intéressante mais elle présente l’inconvénient donner au jaunes une couleur « maronnasse ».
Il serait intéressant de rédiger ultérieurement un article sur les plantes tinctoriales utilisées principalement en France.Merci d’avance.
J’adorerais. Il me reste à trouve le temps…
J’ai du raisin d’Amérique que je laisse pousser parce que c’est une « plante des teinturiers », je suis sur Montpellier si quelqu’un en veut ou veux qu’on essaye ensemble de l’utiliser
Oui c’est une plante intéressante pour un joli prune. Mais il faut faire attention la plante peut être invasive.
merci pour ces informations il y a longtemps que je recherche de telles infos
Ravie que ça vous plaise.
Je recommande le remarquable ouvrage de Dominique Cardon « Le monde des teintures naturelles: Nouvelle édition »
Oui c’est un ouvrage de référence. Si on s’intéresse à la teinture végétale, il « faut » l’avoir lu.
Bonjour, j aime beaucoup les nuances faites par teinture sauvage, et de très belles photos. Pour le mordancage je reste tout de même nuancée sur votre démarche du mordancage. Car ce que vous utilisez viens de l etranger et que de ce fait, le cote local, perd du sens.
Avez vous tester le mordancage à la Racine de rhubarbe ? a la cendre de camélia? j aimerai tester pratiquant moi-même les teintures, et ayant l’objectif de 100% local et surtout des teintures solides au soleil et à la lumière. j aimerai vraiment trouver d autres ressources pour cette étape au niveau local.
C est un point de recherche intéressant, qui par la suite donnerai encore plus de plaisir et de satisfaction, n est ce pas? C est avec plaisir que nous pourrions échanger :). Je suis présidente de l Amap Tinctoriale des Cevennes, et travaillons en étroit partage avec les teinturiers, et les ateliers. Vous pouvez visiter notre site : Amaptinctorialesdescevennes.fr
Belle journée,
Bonjour , je suis nouvelle dans le monde du travail de la laine. Je pars du curon et je passe par toutes les étapes de lavage, cardage, filage et enfin tricot.
Cependant je ne me suis pas encore essayée à la teinture. Je me refuse catégoriquement à utiliser de l’alun et j’ai vraiment du mal à trouver quelle technique naturelle utiliser pour le remplacer. Pouvez-vous me conseiller ?
Bonjour
nous ne faisons que diffuser cet article rédigé par Teinture sauvage. Dans l’article, vous trouvez un lien vers un article sur son site qui répond en partie à votre question https://teinturesauvage.fr/un-mordancage-sans-alun/ Vous pouvez la contacter via le formulaire de contact de son site.
Bien cordialement