« L’illustration botanique, un devoir de mémoire » #Art et Botanique
Lors d’une résidence artistique au CBNM (Conservatoire Botanique National de Mascarin), j’ai eu la chance de découvrir dans les archives de celle-ci, l’ouvrage « Voyage autour du monde avec Bougainville » et le travail mené par Philibert Commerson, Jeanne Baret (notamment connue pour y être la première femme à avoir fait le tour du monde), mais surtout P. Philippe Sanguin de Jossigny et Pierre Sonnerat artiste de Commerson. En me documentant et plongeant dans les herbiers, je me suis dit une chose :
« J’aurais voulu être du voyage… » pour voir, pour vivre cette aventure à leurs côtés. Un voyage dans le temps en me projetant à leur époque (XVIIe et XVIIIe siècles).
Mais des questions me vinrent et restaient en suspens, car au nom de la découverte, à la recherche de curiosités botaniques, ces artistes ont fourni un travail incommensurable. Aujourd’hui nous avons la chance d’avoir autant d’outils, de médiums, supports, techniques et de variétés dans le domaine de l’illustration, alors COMMENT EN LEURS TEMPS ONT-ILS FAIT IN SITU ? Nous parlons là de découvreurs, du premier contact, de la première rencontre, du premier point de vue Européano-centré sur des espèces nouvelles à leurs yeux, à leur civilisation, effectués dans des conditions uniques, difficiles et somme toute exceptionnelles (dixit maladies, avaries et fourberies).
C’est par ce constat, quelque peu emphatique, que j’ai poussé ma réflexion sur leurs formations, techniques artistiques, parcours. Il s’avère que j’y ai trouvé un manque d’informations et encore une fois un vide dans le parcours de ces artistes aventuriers et il n’en fallait pas plus pour que j’y vois là un devoir de mémoire.
Débarquer le matériel, découvrir, répertorier et référencer, poser son regard d’artiste sur le sujet à naturaliser et ensuite ?
Citation de Commerson : « Mais aussi il est notoire que, sur les vingt-quatre heures de la journée, j’en ai toujours employé utilement dix-huit. »
Il est de fait que nombre d’herbiers ont joué leur part dans le recensement des spécimens, mais nous parlons bien là d’ILLUSTRATION BOTANIQUE.
Si cette forme d’art est toujours vivante comment ne pouvons-nous pas nous poser légitimement la question : OÙ PREND-ELLE RACINE ?
L’apparition de lithographies, dans ce courant de l’illustration comme procédé, est un exploit car complexe et n’étant pas à la porter de tous mais, est-ce pour ces raisons que peu de noms ont ainsi marqué l’histoire de l’ « illustration » botanique en France ?
Aujourd’hui, nombre de mes questions ont trouvé réponse, mais ce n’est là que le préambule à cette enquête historique.
Tout ceci est le fruit d’un travail déjà amorcé depuis 2018, autour d’espèces botaniques découvertes par Commerson. Grâce au travail de conservation des recueils, récits et ouvrages des différents Musées de l’île de la Réunion, Charente-Maritime, Bretagne et Paris ; j’ai puisé dans la part historique qui m’inspire tant et j’ai utilisé leurs connaissances pour enrichir mon travail de création, faisant écho à un style suranné dans une époque sublimée.
Aujourd’hui, je suis illustrateur naturaliste avec pour démarche artistique un devoir de mémoire.
- Le CBN de Mascarin
- Le Pôle Patrimoine écrit, Médiathèque de Rochefort
- La Société de Géographie de Rochefort
- La Bibliothèque Nationale de France
- Service historique de la Défense – Division Sud-Ouest
- Archives Municipales de Lyon
Si le travail de l’atelier Pado vous intéresse, n’hésitez pas à aller consulter ses créations !
Vous pouvez envoyer vos contributions sur l’Art et la Botanique jusqu’au 10 novembre 2022. Toutes les informations pour contribuer sont disponibles sur l’appel à articles.
2 commentaires
Si ce témoignage peut vous renseigner. En 2010, en entretien de recrutement dans un Conservatoire botanique national, les recruteurs et pas des moindres se sont littéralement moqués de moi quand j’évoquais ma passion pour l’histoire et la généalogie. Cela a déclenché l’hilarité générale dans la salle. Les lieux de consultation que vous évoquez sont sans doute inconnus à beaucoup de professionnels de la botanique qui sont principalement de très bons techniciens de terrain qui totalisent un nombre impressionnant d’heures de vol.
D’accord avec vous. Si je publie un article d’histoire au sujet d’une plante l’accueil des botanistes, du moins en général, est peu favorable. Le cloisonnement des spécialités est la cause de cette approche réductrice. Une autre raison est peut-être à chercher dans le fait que l’histoire des sciences et des techniques n’est pas suffisamment enseignée en France.