Une plante de plus de 30 000 ans
Des biologistes russes ont réussi à faire pousser une plante à partir de graines non germées datant d’avant la dernière glaciation.
La steppe à mammouths, un écosystème disparu à jamais il y a 13 000 ans à la fin de la glaciation, est-il sur le point de revivre ? En tout cas, une plante vieille de quelque 32 000 ans, de l’espèce Silene stenophylla (qui n’est pas éteinte), vient d’être rappelée à la vie par l’équipe de Svetlana Yashina, de l’Institut de biologie cellulaire de l’Académie des sciences russe.
L’enchaînement de circonstances à l’origine de la résurrection de la petite plante herbacée vivace est étonnant. Il a d’abord fallu, il y a environ 32 millénaires, qu’un écureuil en accumule des graines dans son terrier d’hibernation. Pour passer l’hiver, les écureuils arctiques creusent en effet dans le sol gelé des terriers de la taille d’un ballon de football ; ils les bourrent ensuite de paille et de poils, avant d’y déposer des réserves. Quand le terrier se remplit de glace pérenne, un dispositif naturel de conservation cryogénique se forme, où la température se stabilise autour de -7 °C, ce qui assure une conservation quasi parfaite.
Enfoui à quelque 38 mètres de profondeur sous le niveau actuel de la toundra, près de la rivière Kolyma en Sibérie extrême-orientale, l’un des terriers que les chercheurs ont retrouvés contenait trois fruits de Silene stenophylla qui n’avaient pas germé. Dans le funicule de ces graines, c’est-à-dire la très fine tige reliant la graine au placenta (le milieu riche en acides aminés qui nourrit la graine en train de germer), des cellules de placenta viables s’étaient conservées.
Après avoir essayé en vain de faire germer les graines, les biologistes ont tenté d’obtenir des pousses du tissu placentaire in vitro, sous une température et une lumière contrôlées. Un jour, S. Yashina a découvert une pousse transparente, qui est ensuite devenue une plante complète, et a pu être multipliée. La spectroscopie de masse a révélé que la graine fossile était âgée de 31 800 ± 300 ans !
Il s’avère que la Silene stenophylla fossile n’a pas le même phénotype que ses congénères actuels de la toundra sibérienne […].
En savoir plus :
– Voir la suite de l’article du 14/03/2012 par François Savatier sur Le site www.pourlascience.fr
– Voir la publication : S. Yashinaa et al., Regeneration of whole fertile plants from 30,000-y-old fruit tissue buried in Siberian permafrost, PNAS, prépublication en ligne, 21 février 2012 (accès payant).
———–
Photo d’illustration : Silene stenophylla, S. Yashina, Institut de biologie moléculaire de l’Académie des sciences, Russie.