Quel est cet arbre dans ma ville ? Le micocoulier de Provence
Cet été, The Conversation France vous emmène battre le pavé des villes avec Serge Muller, botaniste au Muséum national d’histoire naturelle, à la découverte d’arbres peu connus. Car il n’y a pas que le platane, le tilleul et le marronnier qui égaient et rafraîchissent nos cités !
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Le micocoulier de Provence (Celtis australis L.) est une espèce ligneuse maintenant rattachée, suite à l’adoption d’une classification phylogénétique des espèces, à la famille des Cannabaceae (la famille du chanvre et du houblon), alors qu’il était antérieurement rattaché à celle des Ulmaceae (la famille des ormes).
C’est un bel arbre pouvant dépasser les 30 mètres de hauteur et atteindre plusieurs centaines d’années d’âge, formant alors une cime ample et érigée. Son tronc, qui peut dépasser le mètre de diamètre, présente une écorce lisse et grise, devenant plus ou moins fissurée pour les vieux arbres.
Les branches se terminent par des rameaux pendants et flexibles, un peu en zigzag. Les feuilles sont simples (c’est-à-dire non composées), alternes (insérées isolément, en alternance de position), ovales, dentées, asymétriques à leur base, avec une pointe effilée ; elles ont trois nervures principales partant de leur base et saillantes sur la face inférieure et sont scabres (c’est-à-dire très rugueuses au toucher) sur leur face supérieure. Elles ressemblent un peu aux feuilles de l’ortie, ce qui lui a valu le nom anglais de nettle tree.
Cet arbre produit au printemps de petites fleurs vertes, pollinisées par le vent. Celles-ci conduisent à des fruits (de 10 à 12 mm de diamètre), charnus et comestibles, appelés micocoules.
Le micocoulier de Provence est une espèce à distribution méditerranéenne, présente naturellement dans le Sud de la France. Selon le référentiel européen des habitats naturels EUNIS, il est typique des forêts thermophiles mixtes et peut apparaître également dans des forêts galeries à saule blanc. À partir de cette aire centrée autour de la Méditerranée, l’espèce a été largement naturalisée dans des régions subméditerranéennes et tempérées, dans lesquelles le changement climatique permet son acclimatation.
Mais c’est évidemment dans le Sud de la France qu’on trouve les micocouliers les plus âgés et les plus remarquables. Un micocoulier présent dans le cimetière de Terre Cabade, à Toulouse, et qui a poussé entre les tombes, a ainsi reçu en 2016 le label national d’« arbre remarquable » décerné par l’association ARBRES.
Arbre à croissance rapide, le micocoulier tolère bien la sécheresse, mais nécessite suffisamment de lumière pour assurer son développement.
Il produit un bois dur et souple pouvant être utilisé pour la fabrication de manches d’outils. À Sauve, dans le Gard, le micocoulier est encore cultivé pour la production traditionnelle des fourches.
Il subsiste en outre à Sorède, près de Perpignan, un atelier qui est peut-être le dernier au monde à travailler le micocoulier pour produire des cravaches et des fouets, comme on le faisait dès le XIIIᵉ siècle dans la région.
Du fait de sa croissance rapide, de ses couronnes étalées et de sa bonne résistance à la pollution urbaine, le micocoulier est en outre de plus en plus planté comme arbre d’ornement dans les villes, sur des places, ou en arbre d’alignement, où il produit un ombrage important très appréciable en période de canicule.
À Paris, il constitue ainsi une essence importante de plantations, avec plus de 4000 arbres répertoriés dans les données ouvertes de la ville ; on les trouve en particulier sur le boulevard de l’Hôpital (depuis la place d’Italie jusqu’à la place Valhubert), les boulevards Jourdan et Kellermann, l’avenue de Flandre, les boulevards des Batignoles et de Clichy et aussi la rue de Bretagne.
À Bordeaux, de même, 695 arbres apparaissent dans les données de la ville.
Le micocoulier de Virginie (Celtis occidentalis L.) est une espèce nord-américaine voisine, qui se distingue du micocoulier de Provence, selon Flora Gallica, par ses feuilles lisses à la face supérieure (elles sont rugueuses pour C. australis), ses fruits mûrs pourpre foncé (et non noirs) et son écorce rugueuse et fissurée chez les arbres adultes, alors qu’elle est lisse pour C. australis, devenant plus ou moins fissurée avec l’âge.
Alors que le micocoulier de Provence a un port relativement érigé, régulier et un développement homogène, bien adapté aux plantations sur voirie, le micocoulier de Virginie a un développement davantage divergent, un port plus large et des branches retombantes, ce qui fait qu’il est mieux adapté à une plantation dans un parc ou sur une place, loin de la circulation automobile.
Le micocoulier de Virginie est encore actuellement bien moins répandu dans les villes que l’espèce méditerranéenne, puisqu’il n’y en par exemple que 116 individus recensés à Paris (contre 4 280 de C. australis) ou 169 à Bordeaux (contre 695 de C. australis). Il s’agit d’une espèce plus rustique, supportant mieux les grands froids que le micocoulier de Provence et très bien adaptée aux sécheresses estivales. Un arbre d’avenir donc, tout à fait complémentaire dans ses services écologiques du micocoulier de Provence !
Nous vous donnons rendez-vous lundi prochain pour découvrir et apprendre à reconnaître un nouvel arbre des villes.
12 commentaires
Beau texte.
On trouve aussi des Celtis à Toulouse. Combien ?
Cordialement
Dans le sud de la France, le micocoulier sent très très mauvais quand il pleut. Je ne sais pas quel est la cause du phénomène mais c’est une des raisons pour lesquelles je n’en ais pas voulu dans mon jardin.
Le Micocoulier de Provence , je le côtoie quotidiennement en milieu sauvage où il a développé de grandes capacités d’adaptation au bord des torrents ardéchois : les racines sont autant lignifiées que le tronc et à ciel ouvert. il s’est adapté aux périodes de sécheresse qui succèdent aux épisodes cévenols. J’ai réalisé tout un dossier photographique concernant ceux implantés sur les berges du torrent la Thines en Ardèche méridionale. une façon de montrer que pour le Micocoulier , la vie , c’est plus fort que tout.
Bonjour,
vos photos sont elles visibles en ligne? Je n’ai rien trouvé.
Pouvez vous m’envoyer un lien par mail?
Depuis 40 ans que j’habite mon vieux mas, dans la Drôme j’ai la chance d en avoir 2, mais le plus vieux aura enchanté nos années : son ombre bénéfique pendant les canicules,ses chatons au printemps, ses fruits ressemblant à des cerises devenant noires et faisant le régal de nombreux oiseaux, les gros becs entre autres dont le bec charnu sait sait fort bien les décortiquer et les nombreuses mésanges,chardonnerets, serins,pies, huppes faciès,etc…
A l’automne, il perd son lourd manteau qui habille le jardin d’une cape de tons fauves;
Et c’est un spectacle agréable d’identifier, quand il a neigé,tous les oiseaux qui viennent y trouver refuge…C’est un bel arbre, bien touffu et je le savais utile autrefois pour les fouets et les fourches, vers Sorède Son gros tronc ridé par les années prouve qu’il est un vieux grand-père si précieux …
Merci de ce magnifique texte, j’ai voyagé avec vous auprès de ce micocoulier.
Il me semble que c’est un beau (et vieux ?) micocoulier qu’on trouve au centre du Plan Narcissa à Montpellier, non loin du jardin des plantes.
Bonjour j ai 2 micocouliers adultes ils sont depuis l’été dernier envahit par une mouche qui pond ses asticots dans les feuilles que faire que savez vous de cette envahisseur
Je signale 2 exemplaires adultes de Celtis occidentalis square des Récollets à NYONS (Drôme) : probablement plntés fin XIXème siècle ou début XXème.
A noter que le micocoulier de Provence possède un nombre incroyable de noms vernaculaires, plus de vingt ! En anglais, c’est Neetle tree, ou arbre ortie, à cause de l’odeur de la feuille froissée qui rappelle celle de l’ortie.
Bonjour,
On dit aussi que son bois est utilisé pour faire les colliesr qui attachent les clapes (cloches) au cou des brebis de nos garrigues … aucune archive à ce sujet ?
J’ai omis de dire qu’on put, avec patience en faire de ses fruits de la confiture … Cela doit prendre du temps ? A chercher la recette sur le NET et bon courage !
Bonjour, en fait à Sorède, il s’agit d’un atelier Hermès, qui fait travailler des personnes ayant un handicap. J’ai écrit, il y a très longtemps, pour la revue d’Hermès,un reportage sur cet atelier. Je me souviens avoir été frappée par la souplesse du bois de micocoulier et de la beauté des produits finis.
On peut jeter un oeil sur ce site : https://mobijob.wpcomstaging.com/2018/08/16/temoignage-chez-hermes-le-handicap-mental-cree-lexcellence/